Des groupes de défense des droits s'inquiètent du projet de vidéosurveillance pour les JO de Paris

Des groupes de défense des droits s’inquiètent du projet de vidéosurveillance pour les JO de Paris

La proposition du gouvernement français d’utiliser la vidéosurveillance assistée par intelligence artificielle lors des Jeux olympiques de 2024 à Paris a suscité un vif débat en France.

Le Sénat a voté fin janvier à une écrasante majorité en faveur d’un projet de loi qui permettrait son utilisation pendant l’événement, les partisans faisant valoir que la technologie aiderait à prévenir les écrasements de foule ou les attaques terroristes.

Ces craintes ne sont pas surprenantes compte tenu du chaos de la finale de la Ligue des champions de l’année dernière entre Liverpool et le Real Madrid au Stade de France, où la police a utilisé des gaz lacrymogènes et certains fans se sont plaints de comportements antisociaux et d’agressions autour du stade.

L’ombre des attentats coordonnés de novembre 2015 à Paris joue sans doute aussi dans la décision du gouvernement, puisque l’événement pourrait attirer 13 millions de spectateurs.

Cependant, les opposants au projet de loi, tels que les groupes de défense des droits de l’homme, craignent qu’il ne représente un danger pour les libertés civiles, transformant le pays en un État policier.

Comment la loi fonctionnerait-elle ?

La législation prévoit d’utiliser l’IA pour détecter, pour la première fois en France, un langage corporel suspect ou des mouvements de foule via des caméras de vidéosurveillance et des drones, des informations qui seraient transmises directement à la police.

Les indicateurs de comportement suspect pourraient inclure des individus statiques, marchant dans le mauvais sens ou portant une forme de couverture.

La technologie pourrait également être utilisée autour des stades, dans les rues et dans les transports publics.

Autre point de discorde, le projet de loi prévoit que les caméras pourront être utilisées jusqu’en juin 2025 lors d’événements sportifs, festifs ou culturels, dans le cadre d’un pilote expérimental.

Le projet de loi a encore quelques obstacles à surmonter avant sa mise en œuvre pendant les Jeux Olympiques ; en mars, il devrait être examiné par l’Assemblée nationale, avant qu’une commission indépendante (CNIL) examine la législation.

La ministre française des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques a écrit sur Twitter : « Adoption en première lecture par le @Senat du #PJLJOP. Merci aux sénateurs pour leurs contributions à ce texte, qui favorisera la meilleure organisation possible des # Jeux de Paris 2024. L’examen se poursuivra à l’@AssembleeNat avec la même volonté d’équilibre du @gouvernementFR. »

Cette technologie est-elle déjà utilisée ?

Certaines villes françaises utilisent déjà une forme similaire d’intelligence artificielle pour imposer la loi, comme à Massy, ​​une commune de la banlieue sud de Paris.

Régis Lebeaupin, responsable de la protection vidéo à la police municipale de Massy, ​​a expliqué comment les algorithmes sont utilisés pour aider les policiers à détecter les infractions routières.

Il précise : « Lorsqu’un véhicule se gare dans un espace interdit, l’analyse vidéo nous envoie un signal qui nous fait gagner du temps. L’image nous parvient directement. »

Actuellement, cette technologie est très réglementée ; En France, la reconnaissance faciale est interdite et devrait le rester lors du vote de la nouvelle loi.

Lebeaupin ajoute : « Le cadre légal français interdit le croisement des données. Bien sûr je filme des visages, cependant la loi m’interdit de rattacher ce visage à une identité. »

Une menace pour les libertés civiles ?

Le 13 février, le groupe français de défense des droits numériques, La Quadrature du Net, a lancé une campagne contre l’utilisation de la vidéosurveillance algorithmique.

Noémie Levain, avocate du groupe, a déclaré : « Les JO, c’est un prétexte. On sait que ça ne s’arrêtera pas en 2025. Dès qu’il y a une expérimentation, ça se pérennise. C’est important de voir le mouvement que la France est prenant avec cette loi, de vouloir accorder plus d’importance au développement du marché de la vidéosurveillance qu’aux libertés publiques.

Levain a fait valoir qu’alors qu’à Bruxelles, la réglementation de telles mesures est débattue, en France, le gouvernement « ne se soucie pas » des libertés civiles.

« En deux mois, elle a adopté une loi qui prend le chemin inverse. C’est le premier pays européen à adopter une telle loi », a-t-elle ajouté.

Autre sujet de préoccupation pour les groupes de liberté civile, la conservation des données, fixée jusqu’à présent à cinq ans, une durée qui s’étendrait bien au-delà des Jeux Olympiques.

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