Baguettes fraîchement préparées, dans une boulangerie française.

« Fait maison » : la France souhaite que les restaurants indiquent sur la carte s’ils ont préparé ou non leurs plats

Un menu avec des détails. En plus de décrire chacun des plats, indiquez s’ils ont été préparés ou non. Ou comme on dirait en français, que ce soit (fait maison) ou pas. La ministre en charge du secteur, Olivia Grégoire, souhaite que cette mesure devienne une réalité dans tous les restaurants de France, dont la riche gastronomie fait partie de la Patrimoine immatériel de l’humanité. L’objectif est d’offrir plus de transparence aux convives, mais aussi de mettre en avant les restaurateurs qui proposent une alimentation non industrielle, à base de produits frais et soigneusement choisis.

L’initiative vise à donner un nouvel élan à un label qui existe déjà depuis 2014, mais qui est facultatif et très peu utilisé. L’idée va désormais plus loin. Les 175 000 restaurants du pays doivent informer leurs clients des repas qui n’ont pas été préparés dans leur propre cuisine. « Les consommateurs doivent en savoir plus sur ce qu’il y a dans leur assiette, d’où il vient et comment il est préparé. » défendu mardi Grégoire, Ministre du Commerce, des Petites et Moyennes Entreprises et du Tourisme.

La mesure doit entrer en vigueur au plus tard en 2025, comme le détaille une chronique de l’hebdomadaire. Mais le plus tôt sera le mieux. « Nous ne pouvons pas aujourd’hui dans notre pays, à quelques mois des Jeux Olympiques et Paralympiques, alors que le monde entier viendra en France découvrir nos saveurs et nos matières premières, (…) ne pas mieux informer nos consommateurs sur la réalité de ce que qui mangent au restaurant », a-t-il insisté.

Il reste encore. Les nouvelles réglementations doivent encore être définies et débattues au Parlement, précise l’hebdomadaire. L’annonce a cependant déjà suscité une multitude de réactions. À Karim Hakim, propriétaire du restaurant Chez Pradel, dans le nord de Paris, il ne semble pas très convaincu. Il préfère insister sur la difficulté des conditions dans le secteur. « Je pense que si vous faites ce métier, vous voulez toujours le faire maison. Mais c’est difficile, il n’y a pas de personnel. Pour certains, il n’y a pas d’autre choix », dit-il.

A côté de lui, une serveuse écrit les plats du jour sur un tableau noir. Au menu, un tataki de thon et un tajine d’agneau aux légumes. Dans un petit réfrigérateur se trouvent les tiramisus. Tout . « Quand on fait tout maison, il y a beaucoup plus de travail, il faut plus de personnel, ce qui implique plus de dépenses et cela se répercute sur le prix des plats », poursuit le chef local, prêt à servir une cinquantaine de couverts.

Évitez la tromperie et valorisez le travail des cuisiniers

La Association Française des Maîtres Restaurateurs, distinction d’État qui récompense les meilleurs professionnels du secteur pour la fraîcheur de leurs produits, leur cuisine 100% maison et la qualité du service, estime que près de 7 000 restaurants proposent une cuisine entièrement faite maison dans le pays, soit seulement 4% . Les chiffres varient. La Syndicat des métiers et industries de l’hôtelleriel’une des plus grandes organisations patronales du secteur, estime que 54 % de tous les restaurants proposent encore des plats faits maison.

C’est en partie pour cela que le sceau a été créé. Fait Maison en 2014, un logo qui représente un pot sous le toit d’une maison et qui peut être placé sur les menus ou sur les portes des établissements. L’objectif, à cette époque, était de valoriser le travail des chefs et de répondre à un besoin de transparence. Les établissements – restaurants traditionnels, mais aussi chaînes et restauration rapide – doivent respecter un série de critères pour pouvoir l’utiliser : des plats préparés sur place avec des produits frais et bruts.

Le débat tournait alors autour de l’opportunité d’inclure ou non des ingrédients surgelés ou conservés sous vide. À ce jour, l’étiquette est considérée comme vague, car elle n’exige pas d’indiquer si un plat est entièrement fabriqué ailleurs, souvent industriellement, puis réchauffé au micro-ondes. Cela changerait exactement avec la nouvelle réglementation.

Minh Vuong Tõ est l’un des deux chefs du Restaurant franco-vietnamien Marjolaine, également à Paris. Leur carte, qui change chaque semaine, met l’accent sur le fait que tout est fait maison. La mesure annoncée par le Gouvernement lui semble bonne, même s’il estime qu’elle doit s’accompagner de contrôles efficaces. « Si c’est pour éviter le faux « fait maison », c’est très bien », dit-il.

Autres mesures de protection

La France dispose d’autres labels et mesures qui visent à protéger sa gastronomie et à mettre en valeur ses produits locaux. Dans les restaurants, il est courant d’indiquer, par exemple, l’origine de certains aliments, comme la viande. Quant au pain, un décret établit que seuls les endroits qui fabriquent cet aliment du début à la fin peuvent être appelés boulangeries.

Le fameux pain est également protégé par un règlement de 1993, qui précise que le pain traditionnel ne peut contenir d’additifs ni de conservateurs, et qu’il ne peut être fabriqué qu’à partir d’un mélange de farine de blé, d’eau, de sel et de levure. Beaucoup de ces règles visent à réduire la concurrence déloyale et les menaces qui pèsent sur un secteur qui peine de plus en plus à survivre.

« Il y a une vraie concurrence, aujourd’hui c’est de plus en plus difficile, il y a une ubérisation du secteur », a-t-il dénoncé lundi dans FranceTV le chef étoilé Thierry Marx, qui préside l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie, l’une des organisations que le gouvernement a consultées pour mettre en œuvre la future mesure.

Le label « permettrait à ceux qui le font bien d’être récompensés et de ne pas les comparer à ceux qui trichent un peu parfois », a-t-il souligné, insistant sur le fait qu’il ne veut pas non plus distinguer ceux qui décident de ne pas tout proposer fait maison. « Nous devons revenir à l’essence de notre métier. La confiance au marbre est extrêmement importante », a-t-il déclaré.

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